Un amendement du gouvernement majore la dduction pour les emplois familiaux de... 166%
Déposé à la dernière minute - au point de n'avoir pu être examiné en commission des finances, dont la rapporteure générale a néanmoins émis un avis favorable en séance publique - un amendement du gouvernement au projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2015, voté le 4 décembre par les députés, porte de 75 centimes à deux euros la réduction forfaitaire de cotisations par heure travaillée au bénéfice des particuliers employeurs d'aides à domicile.
Difficile de nier l'évidence
Alors qu'il y a encore un an (voir notre article ci-contre du 10 décembre 2014), le gouvernement excluait fermement toute modification du montant de 0,75 euro, il opère un virage à 180 degrés avec cette demande. Il est vrai que, face à la chute continue de l'emploi à domicile (voir notamment nos articles ci-contre du 21 avril et du 29 septembre 2015), il devenait difficile de nier l'évidence.
La suppression de la déduction de 15 points de cotisations en 2011, très partiellement remplacée par la déduction de 0,75 euro par heure travaillée, a eu un effet délétère sur l'emploi à domicile et sans doute poussé une partie des employeurs et des salariés vers le travail au noir. Ce n'est d'ailleurs peut-être pas un hasard si cet amendement surprise intervient juste après l'annonce d'une hausse record du nombre de demandeurs d'emplois au mois d'octobre 2015.
Certes, lors de la discussion de l'amendement à l'Assemblée, Christian Eckert, le secrétaire d'Etat chargé du budget, a plaidé qu'"il est assez difficile de faire la part entre ce qui a pu être perçu comme un alourdissement des cotisations sociales et l'impact de la conjoncture économique". Mais il reste que les familles et les ménages aisés ne sont pas les seuls à avoir diminué leur recours aux emplois à domicile. Même au sein de la catégorie des employeurs fragiles - bénéficiaires de prestations sociales pour financer l'aide à domicile -, l'activité déclarée par les bénéficiaires de l'APA a chuté de 8,8% au premier trimestre 2015 et de 2,3% chez les particuliers employeurs en situation de handicap ou invalides.
Un coût budgétaire de 225 millions d'euros
Face à la pression des parlementaires, y compris au sein de sa majorité, le gouvernement avait été contraint de faire un premier geste à l'automne 2014. Mais, à l'issue d'un bras de fer avec les députés (voir notre article ci-contre du 27 novembre 2014), le secrétaire d'Etat chargé du budget avait considérablement réduit la portée de ce geste. Au final, l'exonération avait été portée de 0,75 à 1,5 euro par heure travaillée, mais uniquement pour les salariés à domicile assurant des gardes d'enfants de 6 à 14 ans, excluant ainsi la garde d'enfants de 0 à 6 ans et les interventions auprès d'autres publics fragiles comme les personnes âgées ou les personnes handicapées.
Avec le nouvel amendement du gouvernement, le revirement est spectaculaire, puisque - hormis le cas de la garde d'enfants de 6 à 14 ans - la réduction progresse de 166% ! Le coût est tout aussi spectaculaire, avec une estimation budgétaire de 225 millions d'euros en année pleine, qui devra être intégrée aux crédits du ministère du Travail. Christian Eckert a expliqué ce geste conséquent était rendu possible par le fait que "les conditions d'équilibre des finances publiques sont aujourd'hui un peu moins dures"...
Selon les explications du secrétaire d'Etat chargé du budget, cette réduction équivaut à 20% du salaire brut au niveau du Smic, soit un niveau d'exonération supérieur, toujours au niveau du Smic, à la déduction de 15 points qui était applicable jusqu'en 2011.
"Un accélérateur puissant pour l'emploi"
L'annonce de cette décision surprise n'a pas manqué de réjouir la Fédération des particuliers employeurs (Fepem). Dans un communiqué publié dès le 4 décembre, la Fédération se félicite d'"une excellente nouvelle pour les employeurs comme pour les salariés qui partagent une relation d'emploi responsable et solidaire".
Elle voit dans cette augmentation "significative" de la déduction forfaitaire "un accélérateur puissant pour l'emploi déclaré à domicile". La Fepem se veut donc résolument optimiste, en estimant qu'"après douze trimestres consécutifs de destruction des emplois déclarés entre particuliers, l'heure de la reconquête a sonné !".
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : projet de loi de finances rectificative pour 2015 (examiné en première lecture à l'Assemblée nationale du 30 novembre au 8 décembre 2015).
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